Monsieur le Président,
En ce premier jour de Ramadan, je voudrais m’adresser à vous pour m’indigner et vous demander de mettre fin à ces arrestations tout azimut de jeunes dont le seul tort est de manifester contre votre projet de sélectionner vos propres adversaires à la prochaine élection présidentielle, élection à laquelle vous ne pouvez pas participer. Ni le droit ni la morale ne vous y autorisent.
Monsieur le Président
Les rafles organisées de nos enfants qui sont l’avenir de ce pays nous est insoutenable. La place de notre jeunesse n’est pas dans les commissariats encore moins dans les geôles! Dans le communiqué du dernier Conseil des ministres, nous attendions vos mots d’apaisement du “Père de la Nation” en ce mois Ramadan, mois de Pardon et de Bienveillance pour toute la Oumma islamique. En lieu et place, vous donnez ordre sans équivoque aux forces de défense et de sécurité et certainement à la Justice de continuer à traquer sans merci tous ces jeunes qui ne font qu’exercer leur droits politiques tels que définis par la Constitution sénégalaise et le Pacte international relatif aux Droits civils et politiques signé par le Sénégal le 6 juillet 1970 et ratifié le 13 février 1978.
Monsieur le Président de la République
Alors que les sénégalais vivent les affres de l’injustice, de l’inflation galopante avec la hausse incontrôlée des prix, le chômage chronique et subissent un stress traumatique aigüe des lendemains incertains, vous rajoutez à leurs souffrances avec votre projet impossible de 3ème mandat tel que vous l’avez avoué sur le bout des lèvres à un organe de presse étranger. Ébahis, les sénégalais y apprennent que vous aviez consulté le Conseil Constitutionnel avant le Référendum de 2016 et il vous aurait assuré à l’avance que vous pourriez vous présenter à l’élection présidentielle de 2024. Ce fut alors une consultation secrète dont vous n’avez informé ni vos compagnons politiques, ni votre parti ni votre coalition. Le plus grave, Monsieur le Président, c’est que vous ne l’aviez pas dit aux Sénégalais durant la campagne pour le Référendum du 20 mars 2016 et les électeurs ont voté à 62,7% votre projet de révision de la Constitution avec la certitude d’avoir définitivement régler la question du troisième mandat qui est source d’instabilité sociale dans notre sous-région.
Monsieur le Président de la République
Sur cette même question, nous voudrions vous rappeler votre dernière déclaration du 31 décembre 2018 devant toutes les télévisions du Sénégal, elle fût claire et sans ambage: vous déclariez la main sur le coeur que votre second et dernier mandat sera celui que vous accordera les électeurs senegalais en 2019. Et nous, vos collaborateurs de l’époque, avons à l’unisson fait résonance urbi et orbi de votre assurance présidentielle d’avoir cadenassé la Constitution. Et voilà que nous, vos concitoyens qui combatîmes avec vous le troisième mandat du Président Abdoulaye Wade, nous revoilà à devoir remettre le coeur à l’ouvrage pour combattre la régression démocratique que vous comptez nous imposer. Nous, les démocrates sénégalais parmi lesquels une large majorité de jeunes, comptons avec détermination exercer nos droits constitutionnels pour que la Démocratie sénégalaise continue à rayonner.
Monsieur le Président de la République
Il n’est jamais trop tard pour tenter de mieux faire. Par conséquent, prenez la parole, déclarez que vous respecterez la Constitution et que vous ne vous présenterez pas à l’élection présidentielle de 2024, libérez tous ces jeunes injustement embastillés, laissez tous les candidats à l’élection présidentielle concourir librement. En bref, renoncez dès maintenant au tout petit chapitre que vous consacrera l’Histoire si vous persistez dans votre projet impossible de troisième mandat. Envisagez dès à présent la vie en dehors de la station présentielle car Monsieur le Président de la République seul le Pouvoir de Allah reste infini.
” Fait à Dakar le 23 Mars 2023
Aminata Touré, Ancien Premier Ministre
Candidate à l’élection présidentielle de 2024